Gaultier et Sacai, une Couture bien confuse

Rien ne se passe jamais comme prévu. La rencontre de Jean Paul Gaultier et de Chitose Abe devait faire des étincelles — mais le défilé de mercredi s'apparentait plutôt à un pétard mouillé.

Quand le couturier a décidé de prendre sa retraite l'année dernière, sa maison a mis au point une stratégie originale: inviter chaque saison un créateur différent à dessiner une collection de Haute Couture pour Gaultier Paris.

Le choix de Chitose Abe, la célèbre créatrice à la tête de Sacai, avait été salué comme un coup de maître. Après un retard de six mois entraîné par la crise sanitaire, l'ambiance était donc électrique ce mercredi au siège de Gaultier, avant que la designer japonaise n'envoie ses premiers mannequins sur le podium.

Mais très vite, le soufflé est retombé. Visiblement, Chitose Abe a recensé toutes les références à Jean-Paul Gaultier qu'elle a pu trouver — marinières, déconstruction, bombers et trench-coats — et les a passées au mixeur avec ses propres techniques d'assemblage.

Ce qui donnait un résultat plutôt... Désordonné.

Par exemple, les robes en denim déconstruites qui ont fait la renommée du couturier se sont transformées en une robe bizarre, garnie de dix jeans cousus dans le dos. Si cela vous donne une impression confuse, c'est parce que c'était le cas.

Chitose Abe a également tenté de conjuguer l'amour de Jean-Paul Gaultier pour les rayures et sa conception particulière des catégories de genres, mais au lieu des compositions artistiques du créateur français, celle-ci n'a proposé que des assemblages disgracieux et déséquilibrés.

Dans le programme du défilé, on retrouvait le sens de l'humour de Jean-Paul Gaultier, qui s'amusait à donner des titres farfelus à chaque tenue, comme "Upcycle of Life", "Incrediballs" et "Big Trench Accent". Ce dernier désignait un trench-coat transformé en une robe bustier, dont les proportions excentriques avaient quelque chose de bancal. Le genre de look imaginé par un assistant talentueux, mais qui d'habitude ne finit jamais sur le podium.

Certaines idées méritent tout de même une place immédiate au panthéon de la mode, notamment cette combinaison spectaculaire inspirée du bomber, imaginée pour un courtisan fou, ou bien le seul look vraiment mémorable de la collection — une super-héroïne en patchwork de pull irlandais et bottes à plateformes assorties.

Au final, la collection confirmait le talent exceptionnel de Gaultier — et combien il est difficile de marcher dans ses pas. Si Chitose Abe, qui fait sans doute partie des 20 créateurs les plus influents de la mode ces dernières années, a du mal à s'imposer, qu'en sera-t-il des autres ?

Toujours aussi élégant, après le défilé, Jean-Paul Gaultier a salué la foule en compagnie de la créatrice japonaise et de six mannequins, depuis le balcon du deuxième étage de son quartier général, provoquant un embouteillage et un concert de klaxons, tandis que des centaines d'admirateurs les mitraillaient avec leurs téléphones.

Gaultier et Sacai, une Couture bien confuse

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