Anaïs Lerévérend
27 juin 2013
Hugues Hasselmann (Alice et Barnabé ): "En tant que marque, nous devons pousser les détaillants à marger davantage"
Anaïs Lerévérend
27 juin 2013
Dirigeant et directeur artistique de la marque féminine française Enjoy, en train de changer de nom pour devenir Alice et Barnabé, Hugues Hasselmann a revu la politique commerciale de l’entreprise pour adresser un message "solidaire" à ses détaillants, convaincu de la marche à suivre pour préserver le réseau multimarque qui est son seul distributeur. La marque moyen de gamme compte à ce jour 700 détaillants dont un peu plus de la moitié en France.
FashionMag: Vous affirmez avoir une démarche solidaire vis-à-vis des détaillants: en quoi consiste-t-elle?
Hugues Hasselmann: C’est une politique qui est née d’une restructuration commerciale. Nous nous sommes dit qu’il fallait renforcer le partenariat qui nous lie avec nos détaillants. Dès 2010, nous avons réfléchi à ce qui pourrait aider leur activité à surmonter la crise, car évidemment nous sommes tous tributaires de leurs résultats. Mon idée du bon multimarque indépendant, c’est qu’il n’essaie pas de rivaliser avec les chaînes, qu’il trouve son propre terrain complémentaire, avec plus de services, de personnalisation, du conseil donc, mais aussi une fidélisation de la cliente, pourquoi pas avec des ventes privées.
FM: Concrètement, comment vous montrez-vous solidaires?
HH: Nous avons d’abord mis plus de flexibilité dans notre gestion de la trésorerie, s’il y a deux livraisons, il y a deux paiements distincts. Nous permettons aussi les échanges en cours de saison, car nous avons conscience que l’on peut se tromper six mois à l’avance. Et puis, pour l’animation en boutique, nous avons mis en place des capsules de mi-saison pour permettre plus de renouvellement de l’offre.
Mais la principale mesure que nous avons prise est la baisse de nos prix de 25%. Attention, il ne s’agit pas de baisser les prix en boutique mais bien de mieux marger. Aujourd’hui, nous pouvons proposer à nos clients une marge de 3 à 3,4 selon les produits. A mon sens, il faut cela pour qu’un indépendant puisse vivre, tout en restant serein à l’approche des soldes, sachant que, même en bradant, il gagnera encore de l’argent.
FM: Est-ce que cette démarche a été comprise et a porté ses fruits?
HH: Cela fait plusieurs saisons maintenant que nous martelons ce discours, et je peux vous dire que le message est long à faire passer. Notre vision commence à être entendue. Pour la pédagogie, nous avons mis en place un vrai lien avec des vastes campagnes d’appel aux détaillants, mais aussi des prix conseillés, pour les pousser à respecter notre idée de ne pas baisser les prix en boutique. Ce n’est pas évident, certains n’ont pas compris, ou ont mis du temps à intégrer qu’il était dans leur intérêt de marger plus et d’arrêter de courir après les prix bas. Car, s’il est difficile de changer les mentalités pour les détaillants, ce sera encore plus difficile voire impossible de changer celles des consommateurs. Nous ne reviendrons plus en arrière, ils ont pris l’habitude de ne plus payer le prix fort, il faut donc s’y adapter en ne s’exposant pas trop en période de soldes.
Quant à savoir si cela porte ses fruits, oui, heureusement. Il faut un développement des ventes pour compenser les prises de risque liées à cette politique. Sur la saison automne-hiver 13, nous affichons un +15% qui nous satisfait.
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