Publié le
23 sept. 2010
Temps de lecture
5 minutes
Télécharger
Télécharger l'article
Imprimer
Taille du texte

Les textiles techniques dans les pays émergents : la dynamique des marchés, vecteur d'innovation ?

Publié le
23 sept. 2010

Les marchés de volume du secteur textile technique, tels que ceux des infrastructures, des transports ou de l’industrie, connaissent une croissance soutenue dans les pays émergents dont ils accompagnent le développement. Début 2008, la Chine, l’Inde et la Russie importaient 75 % de leurs textiles techniques, surtout ceux à haute valeur ajoutée1, les pays développés ayant alors une avance technologique notable de quelques cinq à dix ans. Conscients des atouts et des performances apportés par les textiles techniques, les « BRIC » ont inscrit un programme spécifique de soutien dans leur actuel plan quinquennal de développement qui pourrait présenter de réelles opportunités d’investissement ou de partenariat pour les acteurs mondiaux des textiles techniques.

En Chine, l’Etat a lancé un plan pour renforcer son industrie textile entre 2009 et 2011. Ce plan vise en particulier à encourager l’innovation nationale en développant des fibres avancées pour la production de masse et les applications diversifiées, et en créant de nouvelles applications pour les textiles industriels. Des objectifs ambitieux ont été définis, comme l’augmentation de l’usage des géotextiles et des textiles industriels basés sur de nouvelles technologies de non tissés (spun-lacing, spun-bonding). De même, une production annuelle de 50 millions de m2 est visée pour les matériaux composites avancés.

Il est vrai qu’avec le boom des infrastructures, le segment de marché des géosynthétiques est très porteur. Pour exemple, la Chine prévoit d’investir plus de 180 milliards de dollars dans la construction de voies ferrées. Elle a aussi d’importants projets concernant l’ingénierie de l’environnement, pour un coût global évalué à 190 milliards de dollars2.

Bien que l’Inde soit la seconde économie textile mondiale après la Chine, avec un secteur textile qui représente 14 % de la production industrielle, l’industrie indienne des textiles techniques est souvent dispersée dans des PME, et ne représente aujourd’hui que 7 % du volume mondial, contre 13 % pour l’industrie textile technique chinoise3.

L’ambition de l’Inde est d’atteindre en 2012 une valeur de 15 milliards de dollars pour sa production de textiles techniques, qui était de 10 milliards de dollars en 2008. L’Etat indien autorise 100 % des fonds d’investissements directs étrangers (FDI) dans le secteur textile, pour lequel l’Inde a reçu plus de 200 millions de dollars de FDI en 2008, en provenance de l’Allemagne, l’Italie, la Turquie, la Chine et la Suisse. Elle établit de nombreux partenariats technologiques, en particulier avec l’Allemagne qui est son principal fournisseur européen en machines textiles.

Le secteur des non tissés devrait y croître très rapidement, ce qui a attiré le groupe finlandais Ahlstrom qui vient d’implanter en Inde une nouvelle usine de produits non tissés à usage médical. Enfin, second producteur mondial de fibres de coton dans le monde, l’Inde affiche un intérêt pour trouver des applications de textiles techniques à valeur ajoutée basées sur les fibres de coton.

De 1990 à 2008, le Brésil a investi environ 13 milliards de dollars en machines et équipements textiles de dernière génération4 afin de s’ouvrir à la compétition internationale, ceci avec l’aide de fournisseurs étrangers tels que l’Italie, partenaire important5 dans ce secteur.

Entre 2004 et 2008, le nombre d’entreprises textiles brésiliennes à augmenté de plus de 15 %. On y voit exploser la demande de textiles techniques à base de fibres de verre, boostée par le marché de l’énergie éolienne qui croît rapidement au niveau mondial, en particulier en Amérique latine. Ainsi, le groupe américain Owens Corning, leader mondial en solutions composites, a installé sa première usine de textiles techniques dans l’Etat de Sao Paulo dès 2006, et n’a pas cessé depuis d’accroître sa capacité de production. Le marché des non tissés se développe, et le segment des non tissés dédiés à l’hygiène représente déjà 40 % de la production de non tissés en volume.

Depuis le début du 21ème siècle, la Russie a connu une croissance économique soutenue, confortée par ses importantes ressources en pétrole et en gaz. Aujourd’hui, on estime que la classe moyenne est passée de 8 millions à 80 millions en dix ans, d’où une demande accrue en produits non tissés, et la Russie serait actuellement une des principales destinations pour les produits non tissés européens6 . Quant au segment spécifique des produits jetables, il pourrait atteindre une valeur de un milliard de dollars en 2011. Aussi, l’entreprise américaine Kimberly-Clark vient d’ouvrir près de Moscou sa première usine russe produisant des couches pour bébés.

Certes, la Russie aurait besoin d’améliorer sa compétitivité dans la fabrication de ses textiles techniques, surtout basés sur les fibres polyester, en mobilisant des crédits pour moderniser ses installations et en augmentant le niveau de qualification. Déjà la mise en place d’un cluster textile dans la région textile de Yaroslavl devrait favoriser les démarches d’innovation. Il se dit aussi que la Russie envisagerait de rejoindre l’OMC7, ce qui devrait contribuer à ouvrir davantage le pays aux investisseurs étrangers.

Si de nombreuses catégories de textiles techniques ont aujourd’hui un énorme potentiel de marché lié à la demande croissante de consommation dans les pays émergents, il existe aussi une demande continue pour de nouveaux matériaux composites. Ainsi dans les BRIC, les quatre secteurs principaux d’utilisation des composites sont la construction, l’automobile, l’aéronautique, l’énergie éolienne, avec aussi l’industrie pétrolière et gazière en Russie. Enfin, il ne faut pas oublier qu’à ce développement florissant des textiles techniques s’ajoutent tous les nouveaux challenges liés au développement durable et au recyclage des matériaux, auxquels sont confrontés les pays en plein développement. Dans ce domaine, les BRIC pourraient devenir des moteurs d’innovation.




1. Industrieverband Garne - Gewebe - Technische Textilien e. V.
2. China’s 11th five-year plan (2006–2010)
3. Technopak Advisors Pvt. Ltd.
4. ABIT (Associação Brasileira da Indústria Têxtil e de Confecção)
5. ACIMIT (Associazione Costruttori Italiani di Macchinario per l'Industria Tessile)
6. EDANA (European Disposables and Nonwovens Association)
7. Organisation Mondiale du Commerce


CHRISTINE BROWAEYS

Tous droits de reproduction et de représentation réservés.
© 2024 FashionNetwork.com