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Ouzbékistan: une industrie entre enjeux industriels et politiques

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3 mars 2014

Comptant parmi les principaux producteurs de coton, l'Ouzbékistan a très largement bâti son industrie autour de la culture et de la transformation de la matière blanche. Le pays était le sixième producteur mondial sur la saison 2012/2013, avec 4,5 millions de balles.

Mais, confronté aux revendications salariales, aux accusations de travail infantile et aux enjeux du développement durable, les industriels se trouvent confrontés à des questions politiques sur lesquelles ils se gardent de prendre les devants sur l'Etat.

Le travail des enfants en Ouzbékistan. Photo AFP archives


Conscients des problèmes associés à leur industrie, les professionnels locaux évoquent néanmoins le problème spontanément. S'ils admettent sans détour les progrès nécessaires dans certains domaines, c'est cependant hors micro qu'ils livrent leur pensée. "Le textile est une source massive d'emplois dans le secteur, et l'industrie du coton a une fonction de grande ampleur à remplir", explique un chef d'entreprise basé dans le sud du pays, de passage à Shanghaï pour le salon Intertextile. "Mais c'est un fait: si une entreprise prend les devants sur ces questions, elle connaitrait forcément une hausse de ses prix, et se retrouvera donc faible face à ses concurrents nationaux. Alors tout reste figé".

Les professionnels laissent donc à l'Etat le choix de donner ou non des directives sur les questions environnementales et sociales de l'industrie, mettant les entreprises locales sur un pied d'égalité. Une avancée qui n'est pas attendue à court terme. "Cela n'arrivera pas avant que le secteur soit suffisamment solide pour tenir le choc", indique un responsable des ventes, sur un stand de Yarn Expo.

"L'un des problèmes est que, par leur boycott de nos productions, les marques nous mettent dans l'impasse. Cela bloque le développement et l'amélioration des conditions de production. Alors que l'on sait, vous comme moi, que ces marques sont les premières à vouloir diminuer les prix au maximum".

Quand bien même l'Etat prendrait les rênes d'une évolution de son industrie textile, le doute persiste sur son impact: officiellement interdit en 2012, le travail des enfants est encore aujourd'hui dénoncé dans le pays.

Selon diverses ONG, environ 2,5 millions d'Ouzbeks sur une population de 30 millions sont réquisitionnés chaque année, sous menaces d'amendes, pour récolter le coton. Enrôlement qui toucherait jusqu'aux écoliers.

Pour la première fois en 2013, les autorités ont permis à des observateurs étrangers d'assister à la récolte. Pas suffisant pour calmer les organismes de défense des droits de l'homme, ou encore les 120 marques qui un an plus tôt bannissaient le coton local dans leurs collections.

Mais, pour certains, une amélioration de la situation est dans l'ordre des choses. Certaines entreprises semblent même commencer à prendre les devants. "Nous sommes un petit pays, dont l'économie est très loin de celle des pays de l'Ouest", rappelle ainsi Ep Park, responsable des ventes de Daewoo Textile, groupe mettant en avant la politique sociale établie à destination de ses employés.

"Nous en sommes à un stade encore préliminaire de notre développement économique. Les questions complexes comme les droits de l'homme ne peuvent que s'améliorer avec la croissance à venir du pays. La vraie question est de savoir dans quelle mesure et de quelle manière l'Etat ouzbek va s'impliquer sur ces questions. En attendant, cela passera par le soutien de donneurs d'ordres".

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