PARIS, 14 juin 2009 (AFP) - Emmaüs a fait appel, à l'occasion de son soixantième anniversaire, à des stylistes de renom comme Christian Lacroix pour organiser dimanche 14 juin à Paris un défilé de créations originales réalisées à partir de textiles de récupération.

Création de Christian Lacroix réalisée à partir de textiles de récupération pour le 60ème anniversaire d'Emmaüs - Photo : Bertrand Langlois/AFP

Sur le podium, de jeunes mannequins, dont certaines non professionnelles, défilent sous des nuages de bulles et les applaudissements nourris du public. Une inscription colorée "Emmaüs, 60 ans, ne pas subir toujours agir" rappelle que le défilé se tient pour le 10e Salon Emmaüs, à la Porte de Versailles.

Les modèles, créés à partir de textiles et accessoires collectés par les groupes Emmaüs, retracent les 60 dernières années de la mode et chaque créateur s'est vu attribuer une décennie.

A Christian Lacroix, les années 50 avec des jupes fluides motif écossais au-dessous du genou et des chemisiers à petits poix. A Stella Cadente, les années 2000 avec le retour de la couleur et des mélanges de motifs, après les décennies 80 et 90, plus rock et plus sombres, vues par les jeunes stylistes Carmen Buisson et Laurent Gibio, ainsi que Marie-Laure Solinas, tous lauréats de la Fondation Elle.

"J'adore ce principe de la création qui se met au service de l'humanitaire", a déclaré à l'AFP Stella Cadente.

Créations de Christian Lacroix réalisées à partir de textiles de récupération pour le 60ème anniversaire d'Emmaüs - Photo : Bertrand Langlois/AFP

"Le vêtement vintage est aujourd'hui à la mode pour deux raisons : c'est moins cher sans empêcher la création et ça s'inscrit dans une consommation plus intelligente", a ajouté la créatrice.

Les modèles, pour certains des pièces uniques, ont ensuite été mis en vente à 150 euros maximum. L'attribution des pièces devait se faire dans l'après-midi par tirage au sort parmi les clientes intéressées.

Pour Christophe Deltombe, le président d'Emmaüs France, ce défilé est un "symbole". "Avec du textile d'occasion, on peut faire du neuf et du très beau et Emmaüs, c'est un peu la seconde vie des hommes, qui après avoir été un peu cassés, reprennent leur souffle", a-t-il affirmé.

Il s'est aussi félicité que l'organisation sexagénaire ait apporté depuis sa création en 1949 par l'abbé Pierre des "réponses fructueuses" aux problèmes de l'exclusion, tout en regrettant de "toujours exister car il y a toujours beaucoup de pauvreté en France".

Création de Stella Cadente réalisée à partir de textiles de récupération pour le 60ème anniversaire d'Emmaüs - Photo : Bertrand Langlois/AFP

M. Deltombe a précisé à l'AFP dans la soirée que le salon avait attiré environ 23 000 visiteurs et récolté 500 000 euros, soit des résultats comparables à l'année passé.

"C'était très touchant et très nostalgique", a dit à l'issue du défilé Isabelle de Merle, 55 ans, une fidèle du salon Emmaüs. "On voyait que les mannequins, qui n'étaient pas payées, y mettaient tout leur coeur et qu'il n'y avait pas tout le business derrière", a-t-elle poursuivi.

Les bénéfices de la vente de ces créations serviront à soutenir par le microcrédit des femmes en Inde. "Certaines vont pouvoir ouvrir un petit commerce ou acheter une vache et ainsi agir socialement dans leur communauté et s'émanciper", a expliqué Alain Fontaine, délégué général d'Emmaüs International, en précisant que "100 à 200 femmes" pourraient bénéficier de ce programme.

Selon Emmaüs, les communautés récoltent chaque année 65 000 tonnes de vêtements d'occasion. Cette activité, qui représente actuellement 30 % de leurs recettes, permet de donner du travail à 2 500 personnes.

Par Marjorie BOYET